Jean Claude BERNHEIM (2010) Impacts du casier judiciaire Un fardeau à supporter collectivement

L’initiative du projet à été prise par le Comité consultatif clientèle judiciarisée adulte en collaboration avec l’Association des services de réhabilitation sociale du Québec.

pichatPréface
Dès la première fois que j’ai été invité à raconter mon histoire au lancement du projet Impacts du casier judiciaire, j’ai été intrigué par les différents thèmes de présentation des intervenants. Les sujets abordés lors des allocutions prononcées, m’ont rejoint directement. Étant, moi-même, une personne judiciarisée, il m’arrive encore à l’occasion de ressentir les impacts négatifs d’avoir un casier judiciaire et ce même 25 ans après ma libération.Je suis devenu une personnalité connue suite à l’atterrissage d’urgence d’un Airbus A-330 dans la nuit du 23 au 24 août 2001. Ce soir-là, j’ai réussi, en tant que commandant de bord, à poser mon avion en catastrophe à l’aéroport de Lajes, sur l’ile de Terceira aux Açores, après avoir subi une perte massive de carburant qui a été suivie par l’extinction complète des moteurs en plein milieu de l’océan Atlantique. Par ce geste, les 293 passagers et 13 membres d’équipage à bord ont tous eu la vie sauve. Cet événement qui a été surmédiatisé a fait de moi un héros national pour un bon nombre de Québécois et est toujours, après 9 ans, très présent dans la mémoire collective des gens. Cependant, comme je le craignais, la couverture médiatique qu’a connu cet événement a amené les journalistes à fouiller mon passé pour finalement faire ressortir à la une, mon expérience carcérale. En 1983, j’ai été arrêté aux États-Unis, pour avoir transporté, en avion, un cargo illégal et j’ai dû purger un temps d’incarcération. Tous les efforts que j’avais déployés depuis ma libération en 1985, pour reprendre ma place dans la société et retrouver ma dignité en tant qu’homme étaient remis en question suite aux articles parus dans les grands quotidiens Montréalais. Encore aujourd’hui, le fait d’avoir un casier judiciaire, pour lequel j’ai obtenu un pardon en 2000, m’oblige à me plier à des vérifications supplémentaires malgré ma réputation et mon statut de commandant de bord, lors de mes déplacements transfrontaliers que ce soit à caractère professionnel ou personnel lorsque je dois me rendre aux États-Unis. Je me suis donc facilement identifié aux problèmes soulevés par les panelistes de la présentation sur les impacts du casier judiciaire : accès non contrôlé aux casiers judiciaires, vérifications abusives, obtention d’une dérogation (waiver), limite du pardon, préjugés sociaux et autres. Je me suis rendu compte que des millions de Canadiens vivent les mêmes situations malgré la réussite de leur réintégration dans la société et le fait qu’ils ont payé leur dette envers cette même société. J’ai aussitôt sympathisé avec cette cause et je me suis associé de façon permanente aux présentations. Aujourd’hui, c’est sans hésitation que j’ai accepté de soutenir ce mémoire qui propose des pistes de solutions intéressantes pour réduire les impacts d’un casier judiciaire et ainsi aider les nombreuses personnes judiciarisées qui ont la volonté de réintégrer notre société en tant que citoyens à part entière. Notre société lutte contre la discrimination et se dit favorable à la réhabilitation des délinquants. Mais, je me pose souvent cette question : si par une soirée d’hiver, de tempête, vous aviez été passager sur un vol en direction d’une destination soleil et que le fait de voler vous rende, comme chaque fois que vous prenez l’avion, très inconfortable, quelle serait votre réaction si vous appreniez, par surcroit, que votre commandant de bord ce soir-là, est un ex-détenu? Dans la même situation, est-ce que votre réaction serait différente si on vous annonçait que c’est le commandant Piche votre pilote? Honnêtement, seriez-vous plus en confiance d’affronter votre inconfort? Pourtant le commandant Piché est exactement la même personne avant et après le fameux vol 236. C’est avec un grand empressement que j’approuve ce mémoire et de plus avec un grand espoir que j’endosse les recommandations du comité consultatif.

Merci et bonne lecture,
Robert Piché
Toujours Cmdt A-330

http://www.asrsq.ca/fr/pdf/rec_mem_cas.pdf


0 commentaire

Laisser un commentaire

Emplacement de l’avatar

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *